Fiorella Herrera : « Mon principal engagement au Pérou est de défendre les droits environnementaux et la vie sous toutes ses formes »
La Péruvienne Fiorella Herrera est une défenseuse de l’environnement et la fondatrice de We Can Be Heroes, une ONG qu’elle dirige depuis plus de 10 ans et qui a mis en œuvre plus de 70 projets socio-environnementaux dans des communautés autochtones et vulnérables à travers le Pérou. Elle a commencé à militer après avoir trouvé un dauphin mort, ce qui l’a amenée à se donner pour mission de protéger la biodiversité tout au long de sa vie. Elle œuvre actuellement à la protection de 25 000 hectares de la forêt amazonienne et a formé plus de 2 600 jeunes à la conservation, à la justice climatique et au leadership orienté vers un but précis. Représentant le Pérou dans des organisations mondiales telles que l’ONU, la FAO et Global Shapers, elle imagine un pays connu non seulement pour sa gastronomie, mais aussi comme un leader en matière de protection de l’environnement et de droits humains. Elle est convaincue que lorsque l’on met son âme dans ce que l’on fait, l’impact est durable. Fiorella Herrera, vous êtes une femme engagée pour les droits environnementaux et les droits humains dans votre pays, le Pérou. D’où venez-vous, que vous faites-vous ? Je suis étudiante en biologie marine et défenseuse des droits environnementaux, de la justice climatique, du développement durable et des droits des communautés indigènes, natives et paysannes. Depuis 2017, je représente le Pérou en tant qu’ambassadrice des Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU et je participe à diverses initiatives telles que Global Shapers, la communauté WECAN de la FAO et la commission environnementale du district de Miraflores à Lima, entre autres. Je suis la fondatrice de l’ONG We Can Be Heroes, qui renforce les capacités des jeunes volontaires à développer des projets socio-environnementaux sur la côte, les hauts plateaux et dans la jungle, qui ciblent les communautés indigènes, autochtones et vulnérables du Pérou. Notre travail vise à lutter contre le changement climatique et nous protégeons aujourd’hui 25 000 hectares de forêt primaire en Amazonie péruvienne, en partenariat avec des acteurs locaux. Quelle est la situation des droits fondamentaux et de l’égalité entre les femmes et les hommes dans votre pays ? En ce qui concerne mon pays, le Pérou reconnaît les droits fondamentaux dans sa Constitution, mais leur mise en œuvre est inégale, en particulier dans les zones rurales et les territoires des peuples indigènes. Les communautés sont constamment menacées par les conflits socio-environnementaux et les activités extractives [ndlr. prospection et exploitation des mines et carrières et ressources naturelles] Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un grave problème dû à la modification de la loi forestière 31973, qui autorise l’exploitation des ressources naturelles en Amazonie péruvienne. Où en sont les discriminations contre les femmes dans votre pays ? Bien que des progrès législatifs aient été réalisés sur les questions d’égalité des sexes, des lacunes persistent dans l’accès à la justice, la participation et la protection des femmes. Les inégalités salariales sont actuellement importantes : seuls 37 % des travailleurs dans l’économie formelle sont des femmes, tandis que les hommes représentent 63 %, et les niveaux de violences faites aux femmes restent élevés. Il y a encore beaucoup à faire pour améliorer la situation. Quelle est la cause principale pour laquelle vous luttez dans votre pays et pourquoi est-ce prioritaire selon vous ? Mon principal engagement au Pérou est de défendre les droits environnementaux et la vie sous toutes ses formes, en protégeant les écosystèmes de la jungle, des hauts plateaux, de la côte et de l’océan. J’ai choisi cette cause parce que je me sens profondément liée à la biodiversité de mon pays : un territoire mégadivers où chaque espèce, chaque forêt, chaque rivière et chaque communauté a une valeur unique et irremplaçable. Lorsque j’ai trouvé un dauphin mort sur la plage en 2013, j’ai compris que je ne pouvais pas rester indifférente. Ce moment a marqué le début d’un chemin de lutte et d’amour pour la nature. Depuis, je consacre ma vie à la protection de la vie marine, des forêts amazoniennes, des montagnes andines et des territoires des communautés indigènes et vulnérables qui sont les gardiennes de ces écosystèmes. À travers mon organisation We Can Be Heroes, je travaille avec les jeunes et les populations locales pour lutter contre le changement climatique par des actions concrètes, en promouvant des projets socio-environnementaux qui naissent des territoires. Pour moi, la défense de la biodiversité n’est pas seulement une cause environnementale : c’est une mission de vie, un acte de justice et une façon d’honorer l’avenir que nous voulons construire. La nature et l’humain sont donc indissociables. Dans votre engagement, est-ce que vous vous heurtez à des obstacles spécifiques du fait que vous êtes une jeune femme ? Oui, en tant que jeune femme et activiste, j’ai rencontré plusieurs obstacles, en particulier dans les régions rurales et en Amazonie, où le machisme est encore profondément ancré dans de nombreux espaces. Plus d’une fois, j’ai eu l’impression que ma voix n’était pas prise au sérieux ou que quelqu’un de plus âgé ou de plus masculin était censé mener les conversations, même lorsque j’étais en charge du projet ! Au cours de nos travaux de conservation dans la forêt tropicale, par exemple, j’ai dû faire preuve de deux fois plus d’engagement et de connaissances pour être entendue. J’ai reçu des commentaires condescendants et j’ai dû franchir des barrières culturelles qui minimisent ou délégitiment le rôle des femmes dans les questions techniques, environnementales ou de leadership communautaire. N’est-ce pas un peu décourageant parfois ? Non, ces défis ne m’ont pas ralentie, au contraire, ils m’ont renforcée ! Je crois fermement que notre présence transforme les réalités. Chaque fois qu’une fille ou une jeune femme d’une communauté amazonienne me dit qu’elle veut défendre la nature comme moi, je sais que nous ouvrons la voie à d’autres femmes pour qu’elles prennent le leadership sans crainte, à partir de leur identité, de leur territoire et de leur force. Pour moi, chaque obstacle que je rencontre finit par être une opportunité : soit pour m’améliorer, soit pour … Lire la suite
